L'exception par Jean-Pierre Haution

Introduction

Il peut paraître paradoxal de réfléchir sur l'exception. En effet, comment penser l'exception si comme le dit Aristote "il n'y a de science que du général", et si l'exception est celle-là même qui s'oppose à la généralité et s'inscrit par nature dans le particulier, voire le singulier ? Toutefois, s'il n'y a pas de science de l'exception, il n'y a peut-être pas non plus de science, entendue comme simple connaissance, sans exception car le général ne saurait être conçu sans rapport avec le particulier. Certes, l'exception n'est pas le singulier ou le particulier, et notre effort de conceptualisation devra s'attacher à spécifier l'exception en elle-même, mais il n'en demeure pas moins qu'en réfléchissant la notion d'exception, nous serons amenés à réfléchir plus généralement sur la nature de la connaissance et sur le rapport que nous entretenons au monde. Pour ce faire, nous articulerons notre problématique autour de trois questions principales qui découperont donc notre développement en trois moments.

Tout d'abord notre travail sera un travail de définition. Il s'agira d'expliquer ce qu'est l'exception et plus précisément ce que nous entendons sous le terme "exception".

Cette mise en lumière nous amènera ensuite à nous demander s'il existe réellement quelque chose comme l'exception ou si au contraire elle n'est que le produit de notre imagination (ou de notre faculté de connaissance).

Enfin, il nous faudra interroger l'utilité de l'exception, autant d'un point de vue épistémologique que d'un point de vue pratique.

I. Qu'est-ce que l'exception, quelle est la signification de ce terme ?

1. Introduction étymologique

Le mot "exception" vient du latin "exceptare" = retirer à tout instant.

On y voit donc l'idée d'une extraction, d'une exclusion.

Mais déjà une première ambiguïté ou équivocité apparaît. Si l'exception est quelque chose que l'on retire d'autre chose, alors on peut se demander si l'exception se retire d'elle-même d'un certain état de chose, ou si c'est nous qui la retirons. Autrement dit, l'exception possède t-elle une nature qui lui est propre, et qui en fait par essence une exception, ou est-ce le regard que nous portons sur elle qui lui confère son statut ?

? caractère ontologique de l'exception ou épistémologique.

Quoiqu'il en soit à présent, ce qui caractérise l'exception, c'est bien qu'elle constitue une mise à l'écart, ou une mise à part : elle est enlevée ou extraite d'un ensemble auquel elle s'oppose, ce que confirment les différents acceptions communément admises du terme.

L'exception en effet, c'est :

1. ce qui est hors de la loi commune, ce qui paraît unique. C'est une particularité ou une anomalie.

2. Une personne qui ne ressemble à aucune autre, qui apparaît unique ou rare

3. Dans l'expression :"à l'exception de quelqu'un ou de quelque chose", elle signifie excepté, non compris.

Toutefois, ces rapides définitions font apparaître, certes une forme commune …..

A un ensemble, c'est-à-dire à une collection d'éléments , mais aussi et surtout la notion fondamentale de loi ou plus exactement de règle.

En effet; l'exception se singularise dans la mesure où elle entre en conflit avec une règle, à laquelle elle n'obéit pas. C'est bien ainsi qu'il faut comprendre l'expression :"C'est l'exception qui confirme la règle". Bien entendu, cela ne signifie pas que l'exception soit la règle, ce qui serait absurde, mais bien plus qu'elle dévoile l'existence d'une règle, sans pour autant la remettre en cause. Il y a donc une fondation réciproque des notions de règle et d'exception.

? là où il n'y a pas de règle, il ne peut y avoir d'exception, car il n'existe rien alors à quoi comparer une chose. Mais inversement, là où il n'y a pas d'exception, il n'y a pas de règle, ou plus exactement, il n'est nul besoin d'énoncer une règle puisqu'elle est toujours suivie, qu'elle va de soi.

Ex. : règles de grammaire. Le pluriel en "s" des noms terminés par [u], sauf : hiboux, choux, genoux, cailloux, poux.

Pour qu'une exception soit une exception il faut donc qu'elle s'oppose à une règle … (à compléter).

Deux caractéristiques de l'exception :

  • elle est "hors la loi"

  • elle est rare

Ce que reflète bien l'adjectif "exceptionnel" qui signifie à la fois "hors de l'ordinaire", "extra-ordinaire", et "rare", "remarquable".

En résumé l'exception apparaît comme ce qui entre en contradiction avec la règle ou la loi commune, ce qui est hors-norme, voire contre-nature. Or, c'est bien ce caractère qui lui est propre qu'il conviendrait d'interroger. Cependant, il est peut-être préférable de mettre en évidence une autre dimension de l'exception. En effet, celle-ci apparaît pour le moment être de l'ordre du fait, de l'être, même si dores et déjà les notions de "règle", de "norme", de "loi" appartiennent éminemment à l'ordre du devoir être. En d'autres termes, dans l'alternative que nous esquissions dès le début, nous ne nous sommes intéressé qu'à l'idée d'une exception entendue comme état de choses, comme relevant d'un simple constat.

L'exception ne dériverait que d'un jugement entendu comme simple appréciation, comparaison.

Or, l'exception ne relève t-elle pas seulement d'un jugement que l'on pourrait qualifier de logique ou de fait, mais aussi d'un jugement qui est de valeur.

Cf. "norme" = moyenne statistique (être), mais aussi modèle, idéal (devoir être).

2. La valeur de l'exception

Le terme d'exception n'est pas neutre (tout ce qui est unique n'est pas exceptionnel, car nous sommes tous uniques). Il est connoté soit négativement pour l'élève qui apprend ses règles de grammaire, mais surtout, il possède une connotation éminemment positive dans la plupart de ses emplois courants.

Un être d'exception est un être rare, remarquable, extraordinaire. Ici, l'exception suscite l'admiration. Il y a donc deux manières d'envisager l'exception, soit en la dépréciant : elle n'est alors que particularité, anomalie, qu'il serait bon d'éradiquer (l'exception, c'est le monstrueux, ce qui répugne à l'ordre des choses) ; soit en la valorisant : elle est alors une sorte d'idéal, de modèle inatteignable que l'on ne peut qu'admirer.

Ainsi, l'homme de génie, artiste ou savant est cet être exceptionnel, qui dépasse l'entendement et la condition commune et qui par là-même est élevé au rang d'idéal.

Nous voyons donc que l'exception est pleine d'ambiguïté. À cet égard, le miracle peut expliciter le double rapport que nous entretenons à l'exception.

Pour le scientifique athée, le miracle est ce fait qui résiste à l'analyse et qui doit être réduit à l'ensemble des lois de la nature. Une fois expliqué, celui-ci devrait perdre son caractère miraculeux, exceptionnel.

À l'inverse, pour le croyant sincère, le miracle est la manifestation de la présence divine. Il est cette exception qui témoigne de la puissance de Dieu.

Le propre de l'exception c'est donc d'être incomprise. Incomprise en ce sens qu'elle s'extrait d'un ensemble, d'un ordre, d'une règle, qu'elle en est exclue. Mais aussi incomprise en ce sens qu'elle refuse toute explication ou encore qu'elle s'oppose à un ordre que l'on voudrait idéal. L'on ne comprend pas le monstre parce qu'il est trop différent, trop particulier pour que nous puissions l'accepter comme tel.

Il y a toujours deux jugements à l'œuvre dans la notion d'exception : un jugement théorique et un jugement moral, ce qui laisse entrevoir que l'exception ne saurait être un simple fait.

Néanmoins, nous sommes en droit de nous demander si l'exception entendue au premier niveau, possède réellement une consistance. L'exception existe t-elle "réellement" ou ne faisons-nous que la construire ?

II. L'existence de l'exception.

1. Nature et exception

Plus haut, nous avons employé le terme "contre-nature" pour parler de l'exception. De même, nous nous sommes servis des notions de monstruosité ou d'anormalité. Or, peut-il exister quelque chose comme le "contre-nature", ou comme l' "anormal" ?

Dans sa Physique, livre II, Aristote distingue les êtres qui sont "par nature", de ceux qui sont "par d'autres causes", autrement dit "contre-nature".

Sont par nature les animaux et leurs parties, les plantes et les corps simples comme la terre, le feu, l'eau et l'air ? lit, manteau. Par nature sont les êtres qui ont en eux-mêmes le principe de leur mouvement.

Aristote distingue donc deux ordres de choses ; celles qui suivent l'ordre naturel et celles qui ne le suivent pas comme les mouvements violents. Ce sont ces dernières qui pourraient être qualifiées d'exceptions. Certes, les êtres contre-nature ne sont pas rares ni uniques, et le terme d'exception est peut-être ici un peu forcé, mais ce qui importe, c'est cette idée que pour qu'il y ait exception, il faut que soit défini un ordre préalable.

Là encore, l'exception confirme la règle. Les mouvements violents confirment qu'il existe des mouvements naturels. Or, qu'en est-il si l'ordre aristotélicien est abandonné ?

Avec Galilée, la séparation effectuée par Aristote entre monde supralunaire et monde sublunaire disparaît, ainsi que celle entre mouvements naturels et non naturels.

? unification des lois de la nature qui implique une universalisation. Il n'y a plus deux ordres de phénomènes mais un seul. Dès lors, il n'y a plus d'espace hors de l'ensemble des lois de la nature. Quelle place reste t-il alors à l'exceptionnel ?

Dans son Traité de la nature humaine (Morale), Hume définit le concept de nature en opposition à trois termes :

  1. La nature est ce qui s'oppose au miraculeux

  2. La nature est ce qui s'oppose au rare, à l'inhabituel

  3. La nature est ce qui s'oppose à l'artifice.

La 3e conception mise à part, les deux premières conceptions de la nature semblent toutes les deux faire intervenir l'idée d'exception, car aussi bien le miraculeux que le rare et l'inhabituel renvoient à celle-ci. L'idée de nature ne semble pas chez Hume réfuter la possibilité de l'exception. Mais c'est justement parce que Hume rejette la causalité et le déterminisme des lois de la nature que sa philosophie laisse une place à l'exception. Le problème demeure d'une coïncidence entre une nature déterministe et la notion d'exception.

Ex. Du miracle. Pour Spinoza, comme il l'exprime notamment dans son Éthique, il n'existe pas de miracle à proprement parler.

Tout effet suppose une cause, et le déterminisme spinoziste implique que chaque événement soit strictement déterminé. Par conséquent, un miracle n'est en rien un événement surnaturel. Certes, il est bien l'expression de Dieu en tant que celui-ci est "Nature naturée" mais il n'est aucunement une exception qui relèverait du fabuleux. Il consiste seulement en une manifestation pour laquelle nous ne possédons encore aucune explication, c'est-à-dire dont nous n'avons pas pu encore déterminer la cause efficiente.

Cf. aussi Claude Bernard :

"Le mot d'exception est antiscientifique ; en effet, dès que les lois sont connues, il ne saurait y avoir d'exception, et cette expression est comme tant d'autres ne sert qu'à nous permettre de parler de choses dont nous ignorons le déterminisme. Ce qu'on appelle actuellement exception est simplement un phénomène dont une ou plusieurs conditions sont inconnues" (La structure du comportement, p. 161).

Il ne saurait donc y avoir de miracle ou d'exception dans la Nature. Mais est-ce à dire que la notion même d'exception soit invalidée ?

2. Norme et loi

En réalité, il semble que nous ayons fait ici fausse route, faute d'avoir assez pris en compte les acquis de notre 1ère partie. À aucun moment, nous n'avons défini l'exception vis-à-vis de la loi, entendue comme loi scientifique, mais toujours vis-à-vis de la règle ou de la norme. C'est donc bien cette distinction entre norme et loi qu'il s'agit d'expliciter.

Dans La structure du comportement, Merleau-Ponty écrit que :

"les structures inorganiques se laissent exprimer par une loi, au lieu que les structures organiques ne se comprennent que par une norme" (Introduction à l'étude de la médecine expérimentale, Deuxième partie, Chapitre premier, V, p. 111.)

Adoptant un point de vue holistique en opposition à un point de vue réductionniste qui tend à réduire l'ensemble des phénomènes à des lois physico-chimiques, Merleau-Ponty affirme donc qu'existent bel et bien deux ordres de phénomènes : les phénomènes physico-chimiques qui obéissent à des lois et qui ne souffrent aucune exception, et les phénomènes biologiques qui sont sujets à la normalité et donc à l'approximation. Seuls ces derniers laisseraient ainsi place à l'exception : à l'anormal, au monstrueux, à l'inhabituel, etc.

Toutefois, la question demeure posée : le caractère exceptionnel de certains phénomènes biologiques est-il inhérent à ceux-ci, ou n'est –il que le fruit de notre ignorance, de la portée limitée de notre entendement ?

Nous voudrions défendre ici l'idée qu'une telle question, quoique naturelle, n'a pas de sens. (cf. Poincaré : "Pour qu'une question ait un sens, il faut qu'on puisse concevoir une réponse qui ait du sens"). Dans une perspective kantienne en effet, cette question n'a pas lieu d'être.

Vouloir répondre à une telle question, c'est vouloir connaître ce qu'il en est "en-soi" de la réalité, alors que comme l'a montré Kant, seuls les phénomènes nous sont accessibles, c'est-à-dire le rapport que nous entretenons aux choses. Or, dans ce rapport nous ne parvenons pas à unifier les phénomènes physiques et les phénomènes biologiques. Au contraire, il demeure entre eux une séparation radicale.

Ainsi nous résolvons la question qui se posait à nous dès le début de notre réflexion. Ou plutôt, au lieu de la résoudre, nous nous donnons les moyens de la dissoudre. Peu importe de savoir si l'exception possède une existence au niveau des choses en elles-mêmes, ou si elle n'est qu'une élaboration de l'esprit. Dans la mesure où nous construisons notre réalité, l'exception possède nécessairement un caractère qui nous est relatif. Autrement dit, l'exception n'existe pas en tant que chose-en-soi (ou du moins nous ne pouvons pas le savoir), mais bien en tant que phénomène que nous pouvons identifier et juger. L'exception serait donc un concept heuristique qui nous permettrait paradoxalement de comprendre le monde qui nous entoure et de nous positionner par rapport à lui.

La question serait donc maintenant la suivante : quel intérêt avons-nous à penser l'exception ?

III. L'utilité de l'exception.

1. L'exception permet l'accès à la règle

Comme nous l'avons indiqué à plusieurs reprises, la notion d'exception joue un rôle à deux niveaux :

le 1er est un niveau que l'on pourrait qualifier de "théorique". À ce niveau, l'exception caractérise un certain état de fait, personne ou événement. Il s'agit alors de découper dans la réalité deux ordres de fait, les premiers qui correspondent en suivant une certaine règle ou norme, les seconds qui dérogent à cette règle, s'opposent à cette norme.

? caractère heuristique de l'exception dans la mesure où elle permet une fois circonscrite et étudiée de comprendre plus aisément ce qui relève de la règle ou de la loi commune.

On peut à cet égard prendre l'exemple de la biologie.

Pour Claude Bernard, il existe deux manières de pratiquer la physiologie. Soit en étudiant les relations que l'être vivant entretient avec son milieu extérieur, sous formes d'actions et de réactions, soit en analysant les états pathologiques du vivant. Autrement dit, afin de comprendre l'état normal de l'organisme, les règles de son bon fonctionnement, il faut avant tout comprendre ses états morbides, qui constituent l'exception.

Une réflexion sur ce qui sort de la norme = l'exception permet donc d'obtenir un savoir positif sur ce qui apparaît comme la normalité organique. Les "lois physiologiques" sont déduites de l'étude de l'exception. Là encore, l'exception confirme la règle.

Néanmoins, l'exemple de la biologie nous entraîne plus loin. Ainsi, dans son ouvrage La structure de l'organisme, Kurt Goldstein s'attache lui aussi à étudier les différentes pathologies liées aux lésions cérébrales comme l'aphasie afin de comprendre les structures normales qui permettent l'appréhension du milieu. Ici encore, l'aphasique apparaît comme l'exception mais il ne demeure pas un simple donné qu'il suffirait de prendre en compte. Certes l'aphasique est l'exception du point du vue du neurobiologiste, mais il vit lui-même son exception. Autrement dit, l'exception n'est pas seulement identifiable par le médecin ou le biologiste, mais elle est identifiée par le malade lui-même. L'état pathologique est ressenti comme exceptionnel par l'organisme, comme inadéquat dans la mesure où il sort (se retire) de la normalité. Tout l'effort de l'organisme est alors de re-construire un milieu à sa mesure afin de retrouver l'adaptation primitive. En d'autres termes, il instaure de nouvelles normes de sorte que comme l'écrit Canguilhem, l'anormal n'est pas le "hors-norme", mais il est celui qui est en possession de nouvelles normes.

Par conséquent, si l'exception est en premier lieu manifestation d'un état de chose, d'un être, elle se définit fondamentalement par rapport à un devoir être, positif ou négatif.

Pour l'organisme, l'exception ne doit pas être. Elle doit être ramenée à la règle, à la norme, même si celles-ci ne coïncident pas avec les anciennes.

Pour disparaître, l'exception entendue ici de manière négative, doit donc satisfaire au devoir être ou bien faire disparaître ce devoir-être lui-même. C'est le cas quand l'exception devient la règle.

Ex. : le divorce. Le divorce pouvait être considéré jusqu'à récemment comme un phénomène exceptionnel même s'il n'était pas unique, il demeurait rare. Or, aujourd'hui il est chose commune et est en passe de concerner la majorité des couples. Le caractère exceptionnel du divorce était la manifestation d'une culture coercitive qui énonçait comme une obligation la perpétuité du mariage. Tandis que de nos jours, le poids moral qui y était lié a presque disparu de sorte que la disparition de la règle a en même temps fait disparaître l'exception.

? il existe une force, un pouvoir de l'exception car l'exception est autant rejetée qu'elle fascine = inscription pratique de l'exception.

2. Le pouvoir de l'exception.

Dans ses Règles de la méthode sociologique, Durkheim définit le crime comme quelque chose de normal et ce pour deux raisons :

  • "En premier lieu, le crime est normal parce qu'une société qui en serait exempte est tout à fait impossible".

? pas d'exception car nécessité

Il écrit :

"Le crime est nécessaire ; il est lié aux conditions fondamentales de toute vie sociale, mais, par cela même, il est utile ; car ces conditions dont il est solidaire sont elles-mêmes indispensables à l'évolution normale de la morale et du droit".

Selon Durkheim, pour qu'une société puisse évoluer et ne reste pas figée, il faut que l'originalité individuelle puisse se faire jour et par conséquent que l'exception existe qu'il s'agisse de "l'idéaliste qui rêve de dépasser son siècle" ou du "criminel". Mais plus encore, l'exception criminelle est utile directement.

Ex. : Socrate condamné justement par le droit athénien = criminel mais son crime, à savoir, l'indépendance de la pensée, qui faisait alors exception était utile "non seulement à l'humanité, mais à sa patrie".

Le pouvoir de l'exception c'est donc sa valeur d'exemple comme nous l'avons déjà mentionné, que cet exemple soit positif ou négatif.

Conclusion

Aussi en conclusion de cette réflexion sur l'exception, nous voudrions paraphraser Durkheim et dire que paradoxalement, l'exception est normale.

Normale car une société traversée de part en part par la règle ne saurait en être exempte. De sorte que l'exception apparaît comme nécessaire.

Mais aussi et avant tout normale parce qu'utile. Utile biologiquement comme nous avons essayé de le montrer dans le cas de l'organisme malade car si l'exception n'était pas reconnue comme telle, elle n'entraînerait pas les réactions indispensables à l'organisme. Utile socialement dans la mesure où une société qui tenterait de réduire l'exceptionnel que ce soit par le haut ou par le bas deviendrait une société statique et stérile. Et à la manière d'un organisme immobilisé, une telle société ne tarderait pas à disparaître.

C'est pourquoi dans des sociétés comme les nôtres qui, par le biais du tout médiatique, tendent à obtenir ce que nous pourrions appeler un "formatage" des opinions ou des comportements, il est peut-être bon de rendre à l'exception son statut tout ambigu, à la fois source de défiance et d'admiration.

Publié le 14/07/2021
Modifié le 14/07/2021