Rousseau en version numérique
Du contrat social
Ouvrage de référence de la philosophie politique, le Contrat social fonde une nouvelle légitimité, celle qui repose sur la souveraineté du peuple opposée à celle du monarque ou du tyran : «Tout gouvernement légitime est républicain.» La démocratie est donc le seul régime politique légitime.
Pour Rousseau, «l’homme est né libre, et partout il est dans les fers »; comme il n’est ni possible ni souhaitable de revenir à l’état de nature, il faut «trouver une forme d’association qui défende et protège de toute la force commune la personne et les biens de chaque associé, et par laquelle chacun s’unissant à tous n’obéisse pourtant qu’à lui-même et reste aussi libre qu’auparavant».
Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes
Le concept d’Etat de nature, central, comme chacun sait dans ce texte, est présenté par Rousseau, comme anhistorique: «un état qui n’existe plus, qui n’a peut-être point existé, qui probablement n’existera jamais, et dont il est pourtant nécessaire d’avoir des notions justes pour bien juger de notre état présent.» L’auteur a donc comme ambition, ici, de mieux comprendre le fonctionnement de la société et des maux dont souffre l’homme en son sein.
Rousseau, Émile ou De l’éducation
On ne connaît point l’enfance : sur les fausses idées qu’on en a, plus on va, plus on s’égare. Les plus sages s’attachent à ce qu’il importe aux hommes de savoir, sans considérer ce que les enfants sont en état d’apprendre. Ils cherchent toujours l’homme dans l’enfant, sans penser à ce qu’il est avant que d’être homme. Voilà l’étude à laquelle je me suis le plus appliqué, afin que, quand toute ma méthode serait chimérique et fausse, on pût toujours profiter de mes observations. Je puis avoir très mal vu ce qu’il faut faire ; mais je crois avoir bien vu le sujet sur lequel on doit opérer. Commencez donc par mieux étudier vos élèves ; car très assurément vous ne les connaissez point ; or, si vous lisez ce livre dans cette vue, je ne le crois pas sans utilité pour vous.
Lettres écrites de la montagne
Rédigées entre le 25 octobre 1763 et le 10 mai 1764, les Lettres écrites de la montagne sont éditées par Rey en 1764. Après la publication de l’ Emile et du Contrat social, le Petit Conseil de Genève condamne à son tour Rousseau, adoptant ainsi la même attitude que les autorités françaises et catholiques : le procureur général de Genève, Tronchin, fait alors paraître les Lettres écrites de la campagne, dans lesquelles il prétend réfuter Rousseau.
Les Lettres écrites de la montagne (il faut noter la référence évangélique au sermon sur la montagne) que Jean-Jacques écrit à Môtiers reprennent donc, pour les défendre, les thèses des deux ouvrages condamnés : mais elles en appliquent les arguments au cas particulier de la ville natale de Rousseau, dont l’auteur critique d’une part, à partir de la Profession de foi du vicaire savoyard, l’intolérance en matière religieuse et, d’autre part, la situation politique, qui correspond au processus de dégénérescence de la démocratie décrit dans le Contrat social.
Discours sur les sciences et les arts
Le Discours sur les sciences et les arts a été écrit dans le cadre du concours de l’Académie de Dijon de 1750. Rousseau donne la parole au héros romain Fabricius par la prosopopée dans son Discours. Lauréat du concours, Rousseau voit son essai fort commenté et lui doit sa célébrité, bien avant son opus magnum Du contrat social.
Comme le veut le concours, le discours répond à une question : il s’agissait alors de déterminer « Si le rétablissement des sciences et des arts a contribué à épurer les mœurs ». Farouche critique des pratiques de son temps, l’auteur présente en deux parties une diatribe contre les sciences et les arts, qui bien loin d’épurer les mœurs éloignent les hommes de la vertu.
Contre le savoir incertain et inutile, Rousseau valorise l’ignorance et la simplicité vertueuse. Il attaque le raffinement et l’effinement des hommes habitués aux sciences et aux arts, et leur oppose une image d’hommes vigoureux et guerriers. Selon Rousseau, les sciences et les arts n’ont fait que corrompre les mœurs et camoufler le joug des tyrans en occupant les hommes à des futilités et leur faisant oublier leur servitude.
Délétères au plus grand nombre, sciences et arts ne nuisent toutefois pas aux grands hommes tels René Descartes ou Isaac Newton. (Wikipedia)
Les confessions
Les Confessions de Jean-Jacques Rousseau est une autobiographie publiée à titre posthume.
Le titre des Confessions a sans doute été choisi en référence aux Confessions de Saint-Augustin, publiées au IVe siècle après Jésus Christ. Rousseau, qui était protestant, accomplit ainsi un acte sans valeur religieuse à proprement parler, mais doté d’une forte connotation symbolique: celui de l’aveu des pêchés, de la confession. On reproche souvent à Rousseau la prétention extrême présente dans certains extraits des Confessions et dissimulée sous une apparente humilité, mais passer outre à la première lecture est nécessaire pour accéder au second niveau de l’œuvre, qui reste un chef d’œuvre de la littérature française.
Composé de 12 livres, Les Confessions de Rousseau sont considérées comme la première véritable autobiographie. La première partie de l’œuvre (livres I à VI) a été publiée en 1782 et la seconde (livres VII à XII) en 1789.
Les rêveries du promeneur solitaire
Les Rêveries du promeneur solitaire tiennent à la fois de l’autobiographie et de la réflexion philosophique : il constitue le dernier des écrits de Rousseau, la partie finale ayant vraisemblablement été conçue quelques semaines avant sa mort, et l’œuvre étant inachevée.
Considérations sur le gouvernement de Pologne et sur sa réformation projetée
Le comte Wielhorski vient en France en 1770 demander leur aide aux hommes politiques et aux philosophes pour tirer la Pologne de la situation de désordre intérieur et de faiblesse géopolitique qui la mine. En effet le morcellement du pays et la division rigide de la population en trois états, l’ingérence constante de la Russie qui place ses candidats sur le trône polonais (Leszczynski a été ainsi évincé), les conflits entre catholiques et « dissidents », la paralysie du législatif due au droit de veto exorbitant accordé à tous les membres de la Diète, la résistance légitime au pouvoir national que peuvent opposer les régions en formant des Confédérations en cas de désaccord avec la Diète, tous ces facteurs sont de graves sources de désordre et rendent l’administration du pays impossible. Rousseau veut rendre à ce trop grand pays force et indépendance.
Discours sur l’économie politique
L’économie politique désigne le gouvernement de l’Etat. Mais l’étymologie du mot « économie » qui renvoie au gouvernement domestique sage ne doit pas nous tromper. Le pouvoir politique est conventionnel et réglé sur les lois, tandis que le pouvoir paternel est fondé sur une relation naturelle et est réglé par le sentiment. Le paternalisme (pour qui le pouvoir politique dérive du pouvoir du père sur ses enfants) est donc faux. Gouverner en outre ne consiste pas à faire les lois. Ceci appartient à l’autorité suprême ou souveraineté. Considérant le corps politique comme un être moral, Rousseau appelle « volonté générale » ce qui « tend toujours au bien-être et à la conservation du tout et de chaque partie ». C’est de cette volonté qu’émanent les lois. Elle est la source des lois. Le gouvernement « n’a que la puissance exécutrice ».
L’article dégage les tâches du gouvernement légitime : celui où l’intérêt du peuple est le même que celui des chefs.
Projet de constitution pour la Corse
La Corse, victime de la pénible domination gênoise, se révolte et rejette ce joug en 1729. Elle garde son indépendance jusqu’en 1768. A cette date, la France alliée de la République gênoise annexe la Corse par le traité de Versailles et met fin à la période d’indépendance. L’île a eu pour chef célèbre Pasquale Paoli, despote éclairé qui désirait donner à son Etat des institutions. Buttafoco prend l’initiative de demander à Rousseau la rédaction d’un projet de constitution. La Corse avait été jugée en effet dans le CONTRAT SOCIAL un des rares pays encore « capable de législation ».
Essai sur l’origine des langues
«L’Essai sur l’origine des langues n’est sans doute que l’ébauche d’une théorie générale du signe que Rousseau avait projeté d’écrire et à laquelle finalement il renonça. Pourtant, sous sa forme actuelle, il soulève des questions essentielles sur la nature et la fonction du langage. Attentif aux symptômes que représentent le déclin des langues populaires, la mort des dialectes et l’altération de la prononciation, Rousseau y jette les bases d’une critique sociale et institutionnelle des formes modernes de la communication. Son évocation d’une parole primitive, soustraite aux rigidités de la convention, conciliant l’expression individuelle et la communication sociale, tient peut-être davantage du mythe que de la réalité. Mais, outre que nombre de ses suggestions sont confirmées aujourd’hui par les travaux de l’ethnologie, elle nous permet de comprendre, par-delà la vérité des faits, le sens et les dangers de l’évolution actuelle. Ce serait en effet un combat d’arrière-garde que de défendre les langues menacées et les modes d’expression traditionnels contre la montée des impérialismes linguistiques, si nous ne disposions d’un modèle de référence qui nous rappelle que la parole peut être autre chose qu’un instrument de communication anonyme. »