Plotin - 1ère Ennéade, livre 6, Du Beau

PLOTIN, 1ère Ennéade, livre 6, Du Beau

Traduction par N. M. Bouillet

Le beau affecte principalement le sens de la vue. Cependant l’oreille le perçoit aussi, soit dans l’harmonie des paroles, soit dans les divers genres de musique : car des chants et des rythmes sont également beaux[1]. Si nous nous élevons du domaine des sens à une région supérieure, nous retrouvons également le beau dans les occupations, dans les actions, dans les habitudes, dans les sciences, aussi bien que dans les vertus. Y a-t-il encore une beauté supérieure ? c’est ce que nous découvrirons par la discussion. Quelle est donc la cause qui fait que certains corps nous paraissent beaux, que notre oreille écoute avec plaisir des rythmes qu’elle juge mélodieux, que nous aimons des beautés purement morales ? La beauté de tous les objets dérive-t-elle d’un principe unique, immuable, ou bien reconnaîtrons-nous tel principe de beauté pour le corps, tel autre pour une autre chose ? Quels sont alors ces principes, s’il y en a plusieurs ? Quel est ce principe, s’il n’y en a qu’un ?

D’abord il y a des objets, les corps par exemple, chez lesquels la beauté, au lieu d’être inhérente à l’essence même du sujet, n’existe que par participation ; d’autres au contraire sont beaux par eux-mêmes : telle est, par exemple, la vertu. En effet, les mêmes corps nous paraissent tantôt beaux, tantôt dépourvus de beauté, en sorte qu’être corps est une chose fort différente d’être beau. Quel est donc le principe dont la présence dans un corps y produit la beauté ? voilà la première question à résoudre. Qu’est-ce qui dans les corps émeut le spectateur, attire, attache et charme son regard ? Une fois ce principe trouvé, nous nous en servirons comme d’un point d’appui pour résoudre les autres questions.

Est-ce, comme tous le répètent, la proportion des parties relativement les unes aux autres et relativement à l’ensemble, jointe à la grâce des couleurs[2], qui constitue la beauté quand elle s’adresse à la vue ? Dans ce cas, la beauté des corps en général consistant dans la symétrie et la juste proportion de leurs parties, elle ne saurait se trouver dans rien de simple, elle ne peut nécessairement apparaître que dans le composé. L’ensemble seul sera beau ; les parties n’auront par elles-mêmes aucune beauté : elles ne seront belles que par leur rapport avec l’ensemble.

Cependant, si l’ensemble est beau, il paraît nécessaire que les parties aussi soient belles ; le beau ne saurait en effet résulter de l’assemblage de choses laides. Il faut donc que la beauté soit répandue sur toutes les parties. Dans le même système, les couleurs qui sont belles, comme la lumière du soleil, mais qui sont simples, et qui n’empruntent pas leur beauté à la proportion, seront exclues du domaine de la beauté. Comment l’or sera-t-il beau ? Comment l’éclair brillant dans la nuit, comment les astres seront-ils beaux à contempler ? Il faudra prétendre de même que, dans les sons, ce qui est simple n’a point de beauté.

Cependant dans une belle harmonie, chaque son, même isolé, a sa beauté propre. Tout en gardant les mêmes proportions, un même visage parait tantôt beau, tantôt laid. Comment ne pas convenir alors que la proportion n’est pas la beauté même, mais qu’elle emprunte elle-même sa beauté à un principe supérieur ? Passons maintenant aux occupations, aux discours. Prétend-on que leur beauté dépende aussi de la proportion ? Alors en quoi fait-on consister la proportion quand il s’agit d’occupations, de lois, d’études, de sciences ? Comment les spéculations de la science peuvent-elles avoir entre elles des rapports de proportion ? Dira-t-on que ces rapports consistent dans l’accord que ces spéculations ont entre elles ? Mais les choses mauvaises elles-mêmes peuvent avoir entre elles un certain accord, une certaine harmonie : ainsi prétendre par exemple que la sagesse est simplicité d’esprit et que la justice est une sottise généreuse, ce sont là deux assertions qui s’accordent parfaitement, qui sont tout à fait en harmonie et en rapport l’une avec l’autre. Ensuite, toute vertu est une beauté de l’âme beaucoup plus vraie que celles que nous avons précédemment examinées : comment peut-il y avoir proportion dans la vertu puisqu’on n’y trouve ni grandeur, ni nombre ? L’âme étant divisée en plusieurs facultés, qui déterminera dans quel rapport doit s’effectuer, pour produire la beauté, la combinaison de ces facultés ou des spéculations auxquelles l’âme se livre ? Enfin comment y aura-t-il beauté dans l’intelligence pure [si la beauté n’est que la proportion] ?

Revenons sur nos pas, et examinons en quoi consiste la beauté dans les corps. La beauté est quelque chose qui est sensible au premier aspect, que l’âme reconnaît comme intime et sympathique à sa propre essence, qu’elle accueille et s’assimile. Mais, qu’elle rencontre un objet difforme, elle recule, le répudie et le repousse comme étranger et antipathique à sa propre nature. C’est que, l’âme étant telle qu’elle est, c’est-à-dire d’une essence supérieure à tous les autres êtres, quand elle aperçoit un objet qui a de l’affinité avec sa nature ou qui seulement en porte quelque trace, elle se réjouit, elle est transportée, elle rapproche cet objet de sa propre nature, elle pense à elle-même et à son essence intime. Quelle similitude y a-t-il donc entre le beau sensible et le beau intelligible ? car on ne saurait méconnaître cette similitude. Comment les objets sensibles peuvent-ils être beaux en même temps que les objets intelligibles ? C’est parce que les objets sensibles participent à une forme (μετοχῇ εἴδους).

Tant qu’un objet sans forme, mais capable par sa nature de recevoir une forme intelligible ou sensible (εἶδος, μορφή), reste sans forme et sans raison[3], il est laid. Ce qui demeure complètement étranger à toute raison divine est le laid absolu. On doit regarder comme laid tout objet qui n’est pas entièrement sous l’empire d’une forme et d’une raison, la matière ne pouvant pas recevoir parfaitement la forme [que l’âme lui donne]. En venant se joindre à la matière, la forme coordonne les diverses parties qui doivent composer l’unité, les combine, et par leur harmonie produit quelque chose qui est un. Puisqu’elle est une, il faut bien que ce qu’elle façonne soit un aussi, autant que le peut être un objet composé. Quand un tel objet est arrivé à l’unité, la beauté réside en lui, et elle se communique aux parties aussi bien qu’à l’ensemble. Quand elle rencontre un tout dont les parties sont parfaitement semblables, elle s’y répand uniformément. Ainsi, elle se montre tantôt dans un édifice entier, tantôt dans une pierre seule, dans les produits de l’art comme dans les œuvres de la nature. C’est ainsi que les corps deviennent beaux par leurparticipation à une raison (κοινωνίᾳ λόγου) qui leur vient de Dieu.

L’âme connaît le beau par une faculté toute spéciale, à laquelle il appartient d’apprécier tout ce qui concerne le beau, lors même que les autres facultés concourent à ce jugement. Souvent aussi l’âme prononce en comparant les objets à l’idée du beau qu’elle a en elle-même, et en prenant cette idée pour règle de ses décisions. Mais comment ce qui est corporel peut-il avoir quelque liaison avec ce qui est supérieur aux corps ? Comment, par exemple, l’architecte peut-il juger beau un édifice placé devant ses yeux en le comparant avec l’idée qu’il en a en lui ? N’est-ce pas parce que l’objet extérieur, abstraction faite des pierres, n’est autre chose que la forme intérieure, divisée sans doute dans l’étendue de la matière, mais toujours une, quoique se manifestant dans le multiple ? Quand les sens aperçoivent dans un objet la forme qui enchaîne, unit et maîtrise une substance sans forme et par conséquent d’une nature contraire à la sienne, qu’ils voient une figure qui se distingue des autres figures par son élégance, alors l’âme, réunissant ces éléments multiples, les rapproche, les compare à la forme indivisible qu’elle porte en elle-même, et prononce leur accord, leur affinité et leur sympathie avec ce type intérieur. C’est ainsi que l’homme de bien, apercevant dans un jeune homme le caractère de la vertu, en est agréablement frappé, parce qu’il le trouve en harmonie avec le vrai type de la vertu qu’il a en lui. C’est ainsi que la beauté de la couleur, quoique simple par sa forme, soumet à son empire les ténèbres de la matière[4], par la présence de la lumière, qui est une chose incorporelle, une raison, une forme. Voilà encore pourquoi le feu est supérieur en beauté à tous les autres corps ; c’est qu’il joue à l’égard des autres éléments le rôle de forme ; il occupe les régions les plus élevées[5] ; il est le plus subtil des corps, parce qu’il est celui qui se rapproche le plus des êtres incorporels ; c’est encore le seul qui, sans se laisser pénétrer par les autres corps, les pénètre tous ; il leur communique la chaleur sans se refroidir ; il possède la couleur par son essence même, et c’est lui qui la communique aux autres ; il brille, il resplendit parce qu’il est une forme. Le corps où il no domine pas, n’offrant qu’une teinte décolorée, n’est plus beau, parce qu’il ne participe pas à toute la forme de la couleur. C’est ainsi enfin que les harmonies cachées des sons produisent les harmonies sensibles, et donnent encore à l’âme l’idée de la beauté, mais en la lui montrant dans un autre ordre de choses. Les harmonies sensibles peuvent être évaluées en nombres ; non pas il est vrai dans toute espèce de nombres, mais dans ceux seulement qui peuvent servir à produire la forme et à la faire dominer.

Voilà ce que nous avions à dire des beautés sensibles, qui, descendant sur la matière comme des images et des ombres, l’embellissent et ravissent par là notre admiration.

Laissant les sens dans leur sphère inférieure, élevons-nous maintenant à la contemplation de ces beautés d’un ordre supérieur[6], dont les sens n’ont pas l’intuition, mais que l’âme voit et nomme sans le secours des organes.

De même qu’il nous aurait été impossible de parler des beautés sensibles si nous ne les avions jamais vues, ni reconnues pour telles, si nous eussions été à leur égard semblables à des hommes aveugles de naissance, de même nous ne saurions rien dire ni de la beauté des arts, des sciences et des autres choses de ce genre si nous n’étions déjà en possession de ce genre de beauté ; ni de la splendeur de la vertu si nous n’avions contemplé la face de la justice et de la tempérance, devant l’éclat de laquelle pâlissent l’étoile du soir et celle du matin. Il faut contempler ces beautés par la faculté que notre âme a reçue pour les voir ; alors, à leur aspect, nous éprouverons bien plus de plaisir, d’étonnement, d’admiration, qu’en présence des beautés sensibles parce que nous aurons l’intuition des beautés véritables. Car devant ce qui est beau, les sentiments qu’on doit éprouver sont l’admiration, un doux saisissement, le désir, l’amour, un transport mêlé de plaisir[7]. Tels sont les sentiments que doivent éprouver et qu’éprouvent en effet pour les beautés invisibles presque toutes les âmes, mais celles surtout qui sont les plus aimantes : c’est ainsi que, placés en présence des beaux corps, tous les hommes les voient, mais sans être également émus ; les plus vivement émus sont ceux qu’on désigne sous le nom d’amants[8].

Interrogeons donc sur ce qu’ils éprouvent ces hommes qui ont de l’amour pour des beautés qui ne sont pas corporelles. Que ressentez-vous en présence de nobles occupations, de bonnes mœurs, d’habitudes de tempérance, et en général en présence d’actes et de sentiments vertueux, de tout ce qui constitue la beauté des âmes ? Que ressentez-vous quand vous contemplez votre beauté intérieure ? D’où viennent vos transports, votre enthousiasme ? D’où vient que vous souhaitez alors vous unir à vous-mêmes et vous recueillir en vous isolant de votre corps ? car c’est là ce qu’éprouvent ceux qui aiment véritablement. Quel est donc cet objet qui vous cause ces émotions ? Ce n’est ni une figure, ni une couleur, ni une grandeur quelconque ; c’est cette âme invisible [sans couleur], qui possède une sagesse également invisible, cette âme en qui on voit briller la splendeur de toutes les vertus, quand on découvre en soi ou que l’on contemple chez les autres la grandeur du caractère, la justice du cœur[9], la pure tempérance, la valeur à la figure imposante, la dignité et la pudeur à la démarche ferme, calme, imperturbable, et par dessus tout l’intelligence, semblable à Dieu et éclatante de lumière. Quand nous sommes ravis d’admiration et d’amour pour ces objets, par quelle raison les proclamons-nous beaux ? Ils existent, ils se manifestent, et celui qui les verra ne pourra jamais s’empêcher de dire qu’ils sont des êtres véritables. Or que sont les êtres véritables ? Ils sont beaux.

Mais la raison n’est pas encore satisfaite : elle se demande pourquoi ces êtres véritables donnent à l’âme qui les possède la propriété d’exciter l’amour, d’où provient cette auréole de lumière qui couronne pour ainsi dire toutes les vertus. Prenez des choses contraires à ces beaux objets, et comparez-leur ce qu’il peut y avoir de laid dans l’âme. Si nous découvrons en quoi consiste la laideur et quelle en est la cause, nous aurons un élément important de la solution que nous cherchons. Supposons une âme laide : elle sera livrée à l’intempérance, injuste, en proie à une foule de passions, troublée, pleine de crainte par l’effet de sa lâcheté, d’envie par sa bassesse ; elle ne songera qu’aux choses viles et périssables ; elle sera entièrement dépravée, n’aimera que les voluptés impures, n’aura d’autre vie que la vie sensuelle, se complaira dans sa turpitude. N’expliquerons-nous pas un pareil état en disant que c’est sous le masque même de la beauté que la turpitude s’est introduite dans cette âme, qu’elle l’a abrutie, souillée de toute espèce de vices, rendue incapable d’avoir une vie pure, des sentiments purs, qu’elle l’a réduite à une existence obscure, infectée par le mal, empoisonnée par des germes de mort, qu’elle Empêche de rien contempler de ce qu’elle doit contempler, de rester seule avec elle-même, parce qu’elle l’entraîne hors d’elle vers les régions inférieures et ténébreuses ? L’âme tombée dans cet état d’impureté, emportée par un penchant irrésistible vers les choses sensibles, absorbée dans son commerce avec le corps, enfoncée dans la matière, l’ayant même reçue en elle, a changé de forme par son mélange avec une nature inférieure. Tel un homme tombé dans un bourbier fangeux ne laisserait plus découvrir à l’œil sa beauté primitive, et ne présenterait plus que l’empreinte de la fange qui l’a souillé ; sa laideur vient de l’addition d’une chose étrangère : veut-il recouvrer sa beauté première, il faut qu’il lave ses souillures, qu’en se purifiant il redevienne ce qu’il était.

Nous avons le droit de dire que l’âme devient laide en se mêlant au corps, en se confondant avec lui, en inclinant vers lui. La laideur pour l’âme consiste à n’être point pure et sans mélange[10], comme pour l’or à être souillé de parcelles de terre ; qu’on enlève ces scories, il ne reste plus que l’or, et alors il est beau parce qu’il est séparé de tout corps étranger, parce qu’il est ramené à sa seule nature. De même l’âme, affranchie des passions qu’engendre son commerce avec le corps quand elle se livre trop à lui, délivrée des impressions extérieures, purifiée des souillures qu’elle contracte par son alliance avec le corps, enfin réduite à elle-même, dépose cette laideur qui ne lui vient que d’une nature étrangère à la sienne.

Ainsi, comme le dit une antique maxime[11], le courage, la tempérance, toutes les vertus, la prudence même, ne sont qu’une purification. C’est donc avec sagesse qu’on enseigne dans les mystères que l’homme qui n’aura pas été purifié séjournera, dans les enfers, au fond d’un bourbier, parce que tout ce qui n’est pas pur se complaît dans la fange par sa perversité même : c’est ainsi que nous voyons les pourceaux immondes se vautrer dans la fange avec délices. En quoi ferions-nous en effet consister la véritable tempérance si ce n’est à ne pas s’attacher aux plaisirs du corps, à les fuir même comme impurs et propres à un être impur ? Le courage ne consiste-t-il pas à ne pas craindre la mort, qui n’est autre chose que la séparation de l’âme d’avec le corps ? Celui qui veut s’isoler du corps ne saurait donc craindre la mort. La grandeur d’âme n’est que le mépris des choses d’ici-bas. Enfin la prudence, c’est la pensée qui, détachée de la terre, élève l’âme au monde intelligible. L’âme purifiée devient une forme, une raison, une essence incorporelle, intellectuelle ; elle appartient tout entière à la divinité, en qui se trouve la source du beau et de toutes les qualités qui ont de l’affinité avec lui.

Ramenée à l’intelligence, l’âme voit donc croître sa beauté : en effet, sa beauté propre, c’est l’intelligence avec ses idées ; c’est quand elle est unie à l’intelligence que l’âme est véritablement isolée de tout le reste. Aussi dit-on avec raison que le bien et le beau pour l’âme, c’est de se rendre semblable à Dieu[12], parce qu’il est le principe de la Beauté st des essences ; ou plutôt l’Être est la Beauté, l’autre nature[13] [le non-être, la matière] est la laideur. Celle-ci est le mal premier, le mal même, comme Celui-là [le Premier principe] est le Bien et le Beau : car il y a identité entre le Bien et la Beauté[14]. Aussi est-ce par les mêmes moyens qu’on doit étudier la beauté et le bien, la laideur et le mal. Il faut assigner le premier rang à la Beauté, qui est identique avec le Bien et dont dérive l’Intelligence qui est belle par elle-même. L’âme est belle par l’Intelligence, puis les autres choses comme les actions, les études, sont belles par l’âme qui leur donne une forme. C’est encore l’âme qui rend beaux les corps auxquels on attribue cette perfection : étant une essence divine, et participant à la Beauté, quand elle s’empare d’un objet et le soumet à son empire, elle lui donne toute la beauté que la nature de cet objet le rend capable de recevoir.

Il nous reste maintenant à remonter au Bien auquel toute âme aspire. Quiconque l’a vu, connaît ce qui me reste à dire, sait quelle est la beauté du Bien. En effet, le Bien est désirable par lui-même[15] ; il est le but de nos désirs. Pour l’atteindre, il faut nous élever vers les régions supérieures, nous tourner vers elles et nous dépouiller du vêtement que nous avons revêtu en descendant ici-bas, comme, dans les mystères, ceux qui sont admis à pénétrer au fond du sanctuaire, après s’être purifiés, dépouillent tout vêtement, et s’avancent complètement nus[16].

L’âme s’avance ainsi dans son ascension vers Dieu jusqu’à ce que, s’étant élevée au-dessus de tout ce qui lui est étranger, elle voie seule à seul, dans toute sa simplicité, dans toute sa pureté, Celui dont tout dépend, auquel tout aspire, duquel tout tient l’existence, la vie, la pensée : car il est le principe de l’existence, de la vie, de la pensée. Quels transports d’amour ne doit pas ressentir celui qui le voit[17], avec quelle ardeur ne doit-il pas souhaiter s’unir à lui, de quel ravissement ne doit-il pas être transporté ! Celui qui ne l’a pas encore vu le désire comme le Bien ; celui qui l’a vu l’admire comme la souveraine Beauté, est frappé à la fois de stupeur et de plaisir, ressent un saisissement qui n’a rien de douloureux, aime d’un véritable amour, d’une ardeur sans égale[18], se rit des autres amours, et dédaigne les choses qu’il appelait auparavant du nom de beautés. C’est ce qui arrive à ceux auxquels sont apparues les formes des dieux et des démons : ils ne regardent plus la beauté des autres corps. Que pensons-nous donc que doive éprouver celui qui voit le Beau même[19], le Beau pur, qui, en vertu de sa pureté même, est sans chair et sans corps, en dehors de la terre et du ciel ! Toutes ces choses en effet sont contingentes et composées ; elles ne sont pas des principes ; elles dérivent de Lui. Si l’on peut arriver à voir Celui qui donne à tous les êtres leur perfection tout en demeurant immobile en lui-même, sans rien recevoir, si l’on se repose dans sa contemplation et qu’on en jouisse, en lui devenant semblable, quelle beauté souhaitera-t-on voir encore ? Étant la Beauté suprême, la Beauté première, Il rend beaux ceux qui l’aiment et par là ils deviennent eux-mêmes dignes d’amour. Voilà le grand but, le but suprême des âmes ; voilà le but qui appelle tous leurs efforts si elles ne veulent pas être déshéritées de cette contemplation sublime dont la jouissance rend bienheureux[20], et dont la privation est la plus grande des infortunes. Car celui qui est malheureux, ce n’est pas celui qui ne possède ni de belles couleurs, ni de beaux corps, ni la puissance, ni la domination, ni la royauté ; c’est celui-là seul qui se voit exclu uniquement de la possession de la Beauté, possession au prix de laquelle il faut dédaigner les royautés, la domination de la terre entière, de la mer, du ciel même, si l’on petit, en abandonnant et en méprisant tout cela, obtenir de contempler la Beauté face à face.

Comment faut-il s’y prendre, que faut-il faire pour arriver à contempler cette Beauté ineffable, qui, comme la divinité dans les mystères, reste cachée au fond d’un sanctuaire et ne se montre pas au dehors, pour ne pas être aperçue des profanes ? Qu’il s’avance dans ce sanctuaire, qu’il y pénètre, celui qui en a la force, en fermant les yeux au Spectacle des choses terrestres, et sans jeter un regard en arrière sur les corps dont les grâces le charmaient jadis. S’il aperçoit encore des beautés corporelles, il doit ne plus courir vers elles, mais, sachant qu’elles ne sont que des images, des vestiges et des ombres d’un principe supérieur, il les fuira pour Celui dont elles ne sont que le reflet. Celui qui se laisserait égarer à la poursuite de ces vains fantômes, les prenant pour la réalité, n’aurait qu’une image aussi fugitive que la forme mobile reflétée par les eaux, et ressemblerait à cet insensé qui, voulant saisir cette image, disparut lui-même, dit la fable, entraîné dans le courant[21] ; de même, celui qui voudra embrasser les beautés corporelles et ne pas s’en détacher précipitera, non point son corps, mais son âme, dans les abîmes ténébreux, abhorrés de l’intelligence ; il sera condamné à une cécité complète, et sur cette terre comme dans l’enfer il ne verra que des ombres mensongères. C’est ici réellement qu’on peut dire avec vérité : fuyons dans notre chère patrie[22]. Mais comment fuir ? comment s’échapper d’ici ? se demande Ulysse dans cette allégorie qui nous le représente essayant de se dérober à l’empire magique de Circé ou de Calypso, sans que le plaisir des yeux ni que le spectacle des beautés corporelles qui l’entourent puissent le retenir dans ces lieux enchantés. Notre patrie, c’est la région d’où nous sommes descendus ici-bas ; c’est là qu’habite notre Père. Mais, comment y revenir, quel moyen employer pour nous y transporter ? Ce ne sont pas nos pieds : ils ne sauraient que nous porter d’un coin de la terre à un autre. Ce n’est pas non plus un char ou un navire qu’il nous faut préparer. Il faut laisser de côté tous ces vains secours et ne pas même y songer. Fermons donc les yeux du corps pour ouvrir ceux de l’esprit, pour éveiller en nous une autre vue, que tous possèdent, mais dont bien peu font usage.

Mais comment faire usage de cette vue intérieure[23] ? Au moment où elle s’éveille, elle ne peut contempler d’abord les beautés trop éclatantes. Il faut donc habituer ton âme à contempler d’abord les plus nobles occupations de l’homme, puis les belles œuvres, non celles qu’exécutent les artistes, mais celles qu’accomplissent les hommes qu’on appelle vertueux. Considère ensuite l’âme de ceux qui produisent ces belles actions. Mais comment découvriras-tu la beauté que possède leur âme excellente ? Rentre en toi-même et examine-toi. Si tu n’y trouves pas encore la beauté, fais comme l’artiste qui retranche, enlève, polit, épure, jusqu’à ce qu’il ait orné sa statue de tous les traits de la beauté. Retranche ainsi de ton âme tout ce qui est superflu, redresse ce qui n’est point droit, purifie et illumine ce qui est ténébreux, et ne cesse pas de perfectionner ta statue jusqu’à ce que la vertu brille à tes yeux de sa divine lumière, jusqu’à ce que tu voies la tempérance assise en ton sein dans sa sainte pureté. Quand tu auras acquis cette perfection, que tu la verras en toi, que tu habiteras pur avec toi-même, que tu ne rencontreras plus en toi aucun obstacle qui t’empêche d’être un, que rien d’étranger n’altérera plus par son mélange la simplicité de ton essence intime, que tu ne seras plus dans ton être tout entier qu’une lumière véritable, qui ne peut être mesurée par une grandeur, ni circonscrite par une figure dans d’étroites limites, ni s’accroître en étendue à l’infini, mais qui est tout à fait incommensurable parce qu’elle échappe à toute mesure et est au-dessus de toute quantité ; quand tu seras devenu tel, alors, puisque tu es la vue même, aie confiance en toi, parce que tu n’as plus besoin de guide ; regarde attentivement : car ce n’est que par l’œil qui s’ouvre alors en toi que tu peux apercevoir la Beauté suprême. Mais si tu essaies d’attacher sur elle un œil souillé par le vice, impur, et dépourvu d’énergie, ne pouvant supporter l’éclat d’un objet aussi brillant, cet œil ne verra rien, quand même on lui montrerait un spectacle naturellement facile à contempler. Il faut d’abord rendre l’organe de la vision analogue et semblable à l’objet qu’il doit contemple[24]. Jamais l’œil n’eût aperçu le soleil, s’il n’en avait d’abord pris la forme[25] : de même, l’âme ne saurait voir la Beauté si d’abord elle ne devenait belle elle-même. Tout homme doit commencer par se rendre beau et divin pour obtenir la vue du Beau et de la Divinité. Ainsi, il s’élèvera d’abord à l’Intelligence[26], il y contemplera la beauté de toutes les formes, et il proclamera que toute cette beauté réside dans les idées. En effet, tout est beau en elles, parce qu’elles sont les filles et l’essence même de l’Intelligence. Au-dessus de l’Intelligence, il rencontrera Celui que nous appelons la nature du Bien, et qui fait rayonner autour de lui la Beauté ; en sorte que, pour nous résumer, ce qui se présente le premier, c’est le Beau. Si l’on veut établir une distinction dans les intelligibles, il faut dire que le Beau intelligible est le lieu des idées, que le Bien, placé au-dessus du Beau, en est la source et le principe ; ou bien placer dans un seul et même principe le Bien et le Beau, mais en regardant ce principe comme le Bien d’abord, et seulement ensuite comme le Beau.

COMMENTAIRE LIVRE SIXIÈME. DU BEAU, par N. M. Bouillet

Pour avoir une connaissance complète de la doctrine professée par Plotin sur la nature du Beau, il faut, à la lecture de ce livre, joindre celle du livre VIII de l’Ennéade V : Du Beau intelligible. En effet, dans le traité que nous examinons ici, Plotin n’a pas tant pour but de faire connaître la nature du Beau que d’expliquer comment, par la vue du Beau, le Musicien et l’Amant, liv. VI, § 1,3, p. 98-103) peuvent s’élever au-dessus du monde sensible et avoir l’intuition de Celui qui est l’auteur même du Beau, de Celui qui est le Bien (§ 7-9, p. 108-113). Ce livre se rattache donc à la Morale, en ce qu’il exhorte à purifier l’âme, enseigne à la séparer du corps, et à l’appliquer à l’étude de ce monde intelligible dont la contemplation doit la ravir et lui procurer une joie ineffable (§ 4-6, p. 104-108). Fuyons dans notre chère patrie (§ 8, p. 111), telle est, sous une forme poétique, la pensée qui résume ce livre et qui en est la conclusion, comme saint Augustin l’explique fort bien dans la citation suivante :

« J’admire en vérité comment de si savants hommes, qui comptent pour rien les choses corporelles et sensibles au prix des choses incorporelles et intelligibles, nous viennent [comme le fait Apulée] parler de contact corporel [entre les dieux et les hommes] quand il s’agit de la béatitude. Que signifie alors cette parole de Plotin : « Fuyons, fuyons vers notre chère patrie. Là est le Père et tout le reste avec lui. Mais quelle flotte ou quel autre moyen nous y conduira ? Le vrai moyen, c’est de devenir semblable à Dieu. » Si donc on s’approche d’autant plus de Dieu qu’on lui devient plus semblable, ce n’est qu’en cessant de lui ressembler qu’on s’éloigne de lui. Or l’âme de l’homme ressemble d’autant moins à cet être éternel qu’elle a plus de goût pour les choses temporelles et passagères. » (Cité de Dieu, t_ X, 17 ; t. II, p. 166 de la trad. de M. Saisset.)

§ 1. RAPPROCHEMENT ENTRE LA DOCTRINE DE PLOTIN ET CELLE DE PLATON.

Plotin a puisé dans plusieurs dialogues de Platon, tels que le Phédon, le Phèdre, le Philèbe, mais principalement dans le Banquet, comme il est facile de le reconnaître en comparant à la doctrine exposée dans ce livre le discours adressé, dans le dialogue de Platon, par Diotime à Socrate (t. VI, p. 314-318 de la trad. de M. Cousin) :

« Celui qui veut s’y prendre comme il convient doit, dès son jeune âge, commencer par rechercher les beaux corps. D’abord, s’il est bien dirigé, il doit n’en aimer qu’un seul, et là concevoir et enfanter de beaux discours. Ensuite il doit reconnaître que la beauté qui réside dans un corps est sœur de la beauté qui réside dans les autres. Et s’il est juste de rechercher ce qui est beau en général, notre homme serait bien peu sensé de ne point envisager la beauté de tous les corps comme une seule et même chose. Une fois pénétré de cette pensée, il doit faire profession d’aimer tous les beaux corps, et dépouiller toute passion exclusive, qu’il doit dédaigner et regarder comme une petitesse. Après cela il doit considérer la beauté de l’âme comme bien plus relevée que celle du corps, de sorte qu’une âme belle, d’ailleurs accompagnée de peu d’agréments extérieurs, suffise pour attirer son amour et ses soins, et pour qu’il se plaise à y enfanter les discours qui sont les plus propres à rendre la jeunesse meilleure. Par là il sera amené à considérer le beau dans les actions des hommes et dans les lois, et à voir que la beauté morale est partout de la même nature ; alors il apprendra à regarder la beauté physique comme peu de chose. De la sphère de l’action il devra passer à celle de l’intelligence et contempler la beauté des sciences; ainsi arrivé à une vue plus étendue de la beauté, libre de l’esclavage et des étroites pensées du servile amant de la beauté de tel jeune garçon ou de tel homme ou de telle action particulière, lancé sur l’océan de la beauté, et tout entier à ce spectacle, il enfante avec une inépuisable fécondité les pensées et les discours les plus magnifiques et les plus sublimes de la philosophie ; Jusqu’à ce que, grandi et affermi dans ces régions supérieures, il n’aperçoive plus qu’une science, celle du beau, dont il me reste à parler.

« Donne-moi, je te prie, Socrate, toute l’attention dont tu es capable. Celui qui dans les mystères de l’amour s’est avancé jusqu’au point où nous en sommes par une contemplation progressive et bien conduite, parvenu au dernier degré de l’initiation, verra tout à coup apparaître à ses regards une beauté merveilleuse, celle, ô Socrate, qui est la fin de tous ses travaux précédents : beauté éternelle, non engendrée et non périssable, exempte de décadence comme d’accroissement, qui n’est point belle dans telle partie et laide dans telle autre, belle seulement en tel temps, dans tel lieu, dans tel rapport, belle pour ceux-ci, laide pour ceux-là ; beauté qui n’a point de forme sensible, un visage, des mains, rien de corporel ; qui n’est pas non plus telle pensée ni telle science particulière ; qui ne réside dans aucun être différent d’avec lui-même, comme un animal ou la terre ou le ciel ou toute nuire chose ; qui est absolument identique et invariable par elle-même ; de laquelle toutes les autres beautés participent, de manière cependant que leur naissance ou leur destruction ne lui apporte ni diminution ni accroissement ni le moindre changement. Quand de ces beautés inférieures on s’est élevé, par un amour bien entendu des jeunes gens, jusqu’à la beauté parfaite, et qu’on commence à l’entrevoir, on n’est pas loin du but de l’amour. En effet, le vrai chemin de l’amour, qu’on l’ait trouvé soi-même ou qu’on y soit guidé par un autre, c’est de commencer par les beautés d’ici-bas, et les yeux attachés sur la beauté suprême, de s’y élever sans cesse en passant pour ainsi dire par tous les degrés de l’échelle, d’un seul beau corps à deux, de deux à tous les autres, des beaux corps aux beaux sentiments, des beaux sentiments aux belles connaissances, jusqu’à ce que, de connaissances en connaissances, on arrive à la connaissance par excellence, qui n’a d’autre objet que le beau lui-même, et qu’on finisse parle connaître tel qu’il est en soi. Ô mon cher Socrate ! continua l’étrangère de Mantinée, ce qui peut donner du prix à cette vie, c’est le spectacle de la beauté éternelle. Auprès d’un tel spectacle, que seraient l’or et la parure, les beaux enfants et les beaux jeunes gens, dont la vue aujourd’hui te trouble, et dont la contemplation et le commerce ont tant de charme pour toi et pour beaucoup d’autres que vous consentiriez à perdre, s’il se pouvait, le manger et le boire, pour ne faire que les voir et être avec eux. Je le demande, quelle ne serait pas la destinée d’un mortel à qui il serait donné de contempler le beau sans mélange, dans sa pureté et sa simplicité, non plus revêtu de chairs et de couleurs humaines et de tous ces vains agréments condamnés à périr ; à qui il serait donné de voir face à face, sous sa forme unique, la beauté divine ! Penses-tu qu’il eût à se plaindre de son partage celui qui, dirigeant ses regards sur un tel objet, s’attacherait à sa contemplation et à son commerce ? Et n’est-ce pas seulement en contemplant la beauté éternelle, avec le seul organe par lequel elle soit visible, qu’il pourra y enfanter et y produire, non des images de vertus, parce que ce n’est pas à des images qu’il s’attache, mais des vertus réelles et vraies, parce que c’est la vérité seule qu’il aime ? Or c’est à celui qui enfante la véritable vertu et qui la nourrit, qu’il appartient d’être chéri de Dieu ; c’est à lui plus qu’à tout autre homme qu’il appartient d’être immortel. »


[1] Voy Platon, Phèdre; 1er HippiasPhilèbe.

[2] C'est la définition des Stoïciens.

[3] Combinant la doctrine platonicienne des idées avec les conceptions péripatéticiennes de forme et d’acte, Plotin distingue dans tout objet deux éléments, la matière et la forme. La Matière est en puissance tous les êtres ; par suite elle est le non-être, la laideur et le mal. La Forme est l’acte, c’est-à-dire l’essence et la puissance ; elle seule possède l’existence réelle, la beauté et la bonté. Les degrés de la Forme sont les degrés mêmes de la pensée et de la vie, savoir : 1° l’idée, ou forme intelligibleprincipe de la vie intellectuelle ; 2° la raison, principe de la vie rationnelle, qui est propre à l’âme raisonnable ; 3° la raison séminale ou génératrice, qui est le principe de la vie sensitive, et qui donne au corps la forme sensible ; 4° la nature, principe de la vie végétative ; 5° l’habitude, principe d’unité des êtres inorganiques. – Quant à l’expression de raison divine, que l’on trouve ci-après, elle signifie la raison qui vient de l’Âme universelle : « L’Âme universelle, répandant sa lumière sur les ténèbres de la matière, l’embellit par les raisons séminales qui façonnent et a forment les animaux. Elle communique la vie aux choses qui ne vivent pas par elles-mêmes, et la vie qu’elle leur communique est semblable à sa propre vie. Or, vivant dans la Raison, elle donne au corps une raison, qui est l’image de la raison qu’elle possède elle-même. » (Enn. IV, liv. III, § 10).

[4] Voy. Platon : Timée ; Philèbe.

[5] Voy. Enn. II, liv. I.

[6] Voy. Platon : Banquet ; Timée.

[7] Voy. Platon : Banquet ; Cratyle.

[8] Voy. Enn. I, liv. III.

[9] Voy. Platon : Banquet ; République, liv. III.

[10] Voy. Platon : Banquet ; Philèbe.

[11] Voy. Platon, Phédon

[12] Voy. Platon, République, liv. X, p. 613.

[13]Voy. Platon, Timée.

[14] Voy. Enn. VI, liv. VII, § 21,22,31-34 ; et Platon : Philèbe ; 1er Alcibiade.

[15] Voy. Enn. V, liv. VIII, § 9.

[16] Ceux qui voulaient être initiés aux mystères d’Éleusis passaient par différents degrés dont le premier était la purification, καθαρμός. Ils se dépouillaient de leurs vêtements, comme le prouvent des vases grecs où ils sont représentés nus.

[17] Voy. Platon, Phèdre.

[18] Voy. Platon, Banquet

[19] Voy. Platon, Banquet

[20] Voy. Platon ; Phèdre

[21] Allusion à la fable de Narcisse.

[22] Voy. Homère : Iliade, liv. X, 27 ; Odyssée, liv. XX, 268. Voy. aussi I’Ennéade I, liv. II, § 1.

[23] Voy. Platon, République, liv. VII.

[24] Allusion à la théorie platonicienne de la vue. Voy. le Timée.

[25] Voy. Platon, République, liv. VI.

[26] Voy. Platon, Philèbe.

Publié le 05/07/2021
Modifié le 05/07/2021